Makiko Furuichi, "Rêverie détrempée"
par Doriane Spiteri
Quotidiennement, Makiko Furuichi dépose à l’aquarelle dans des carnets ses souvenirs, ses rêves et songes. Sa pratique de l’aquarelle la mène depuis plusieurs années aux grands supports. Elle peint alors sur des fresques, des rideaux et des volumes. L’artiste prend en compte l’environnement dans lequel elle intervient. Elle joue avec la dissolution, la dégradation du temps et l’accident. Souvent in situ, sa démarche touche à l’expérimentation. Pendant sa création, l'œuvre s'enrichit des éléments extérieurs, de l’usage ou de l’histoire du lieu, de son imaginaire ainsi que des souvenirs de son enfance.
Intuitive et sensible, sa peinture s’installe par couches successives pour dévoiler les strates du paysage et de sa mémoire.
A 100 mètres de la mer, sur le mur d’une maison de l’avenue Léon Blum à Saint Nazaire, un paysage onirique surgit. Pour stimuler son imagination, l’artiste a visité la ville ainsi que le parc régional de Brière, un milieu singulier entre terre et mer. Sous ses pieds nus, elle s’est imprégnée de la mémoire du lieu formé de l’accumulation de végétaux depuis des millénaires. Au delà du littoral, dans cette ancienne forêt primitive devenue une vaste étendue humide où chaque année de nombreuses plantes aquatiques périssent, se trouve du morta noir et rouge, un bois fossilisé, minéralisé au fil du passage de l’eau.
L’artiste élabore une fresque aux couleurs locales. Les plantes se multiplient et des petits êtres vagabondent. Son œuvre révèle la mémoire de la terre prenant l’apparence d’un fond marin débordant de végétaux et peuplé de y?kai, semblables à de petits animaux. Ces esprits espiègles et farceurs issus de la culture japonaise se mêlent alors aux légendes de Brière.
En collaborant avec la matière et la nature, Makiko Furuichi laisse la couleur se répandre et se dissoudre dans le paysage urbain.